L’affaire des 84 personnes arrêtées lors de la manifestation du 17 juin est appelée actuellement devant le tribunal des flagrants délits de Dakar, en audience spéciale. Le président du tribunal a, d’emblée, précisé que : « le renvoi a été prononcé pour éviter de prolonger la détention des prévenus et de porter atteinte aux droits des autres prévenus qui doivent être jugés ce lundi. En ce moment même, une audience de flagrant délit est en train de se tenir dans une autre salle avec plus d’une cinquantaine de personnes ». Comme pour répondre à un leader de l’opposition qui disait que le procès a été renvoyé pour enlever aux députés leur éligibilité.
Par la suite, le président a appelé à la barre Déthié Fall, Mame Diarra Fam, Khadim Seck, Ibrahima S. Wane, Cheikh Amar, Abdoul M. Ndiaye, Abdoulaye Bèye, Djiby Niass, Bassirou Diop, entre autres. Ils sont poursuivis pour violence et voie de fait contre des personnes et des dégradations contre des biens, attroupement non armé interdit, participation à une manifestation interdite. Des chefs d’inculpation que le mandataire de la coalition Yewwi Askan Wi a rejeté. « Je rejette tous les faits. J’ai introduit une déclaration de manifestation au niveau du préfet de Dakar qui a été interdite. L’interdiction nous a été notifiée et un recours en référé a été introduit à la Cour suprême et c’est à 15 heures que j’ai reçu l’interdiction », a-t-il dit.
Revenant sur les circonstances de son arrestation, il a ajouté : « à 16 heures, on m’a enlevé devant mon siège. Le véhicule du président de la conférence des leaders a été bloqué devant mon siège. Et lorsque je suis descendu pour voir ce qui se passe, c’est là que j’ai été arrêté. La seule réponse qu’on m’a servi c’est que nous avons reçu un ordre pour vous arrêter ».
À la barre, Déthié Fall a indiqué : « on est au Sénégal, une démocratie majeure et le droit de manifester est inscrit dans la constitution. On est de très bons républicains, c’est pourquoi on a introduit un recours après l’interdiction du préfet. On ne peut pas me reprocher une manifestation qui n’a pas existé. Par ailleurs, je n’ai pas mis l’écharpe et si on était dans le respect de mes droits, je ne serais pas là devant vous. Je suis député et mes droits n’ont pas été respectés ».
Mame Diarra Fam : « je dénonce l’attitude des gendarmes »
A sa suite, la député Mame Diarra Fam a été entendu par le tribunal. Comme son prédécesseur, elle a rejeté les faits qui lui sont reprochés. « J’ai été arrêtée à Baobab parce que j’étais partie voir Barthélémy Dias, le maire de Dakar. J’étais avec mes deux enfants qui venaient d’Italie. L’une de mes filles est fan de Barthélémy, c’est la raison pour laquelle nous étions là-bas. Je devais être à la Mecque présentement. Et lorsque je suis allée à Baobab, j’ai montré ma carte professionnelle et les gendarmes m’ont laissé passer. C’est devant chez M. Dias qu’un gendarme m’a mis dans un fourgon. Mes enfants me demandaient Maman qu’est-ce qui se passe ? », a-t-il elle soutenu. Avant de dénoncer l’attitude du gendarme qui l’a arrêté : « vous vous croyez maître de la République. C’est le commentaire de l’adjudant ». Et la députée de promettre au juge qu’elle ira encore voir Barthélémy à sa sortie. « J’ai le droit de circuler librement. Je n’ai désobéi à aucun ordre », a-t-elle aussi dit.
Les autres prévenus arrêtés dans cette affaire à savoir des lutteurs, des vigiles, des chauffeurs et autres ont aussi rejeté les faits. À les en croire, ils n’ont ni de près ni de loin participé à cette manifestation. Cependant, Abdoul Mbathie, a expliqué aux juges la provenance des armes blanches qu’on a trouvé par devers lui. « On nous avait engagé pour assurer la sécurité de la maison de Barthélémy Dias. Il y’avait des jeunes qui semaient le désordre là-bas. J’ai confisqué la corne et une autre arme blanche qu’avait l’un d’entre eux », a-t-il dit pour se dédouaner. L’audience suit son cours.
Cheikh Moussa SARR
27 juin 2022
EMEDIA