Elu en janvier dernier, maire de la ville de Thiès, le Docteur Babacar Diop a fait un état des lieux de la gestion de l’ancien maire, Talla Sylla. Révélant plusieurs malversations, il compte aussi renégocier certains contrats.
Dans son rapport, la maire a évoqué en premier le cas du personnel. A l’en croire, l’effectif et le salaire ont connu des évolutions significatives. Entre 2019 et 2020, le personnel permanent de la mairie a enregistré une hausse de 34,44%, passant d’une moyenne de 58 employés à celle de 78 employés. Pour la même période, la masse salariale est passée de 115 897 036 FCFA à 187 943 610 FCFA, correspondant à une hausse salariale de 62%.
Toujours dans le document, pour la période 2020-2021, l’effectif moyen annuel a augmenté de 30,7%, passant d’une moyenne de 78 à 102 employés permanents. Il y est noté que ces valeurs correspondent aux effectifs constituent des moyennes annuelles et non pas des effectifs absolus au 31 décembre de l’année en cours.
En exemple, Dr Diop soutient que pour l’année 2021, l’effectif total au 31 décembre était de 116 employés permanents. Mais en faisant la moyenne sur la période des 12 mois de l’année, on obtient une moyenne annuelle de 102 employés. Et cette pratique est plus cohérente parce que les effectifs peuvent considérablement varier d’un mois à l’autre. Quant à masse salariale, elle a augmenté de 23% pour la même période, passant de 187 943 610 FCFA à 230 939 777 FCFA.
La Gestion financière
Dans le document, un autre constat est que la mairie éprouve des difficultés à entrer dans ses fonds de recettes. Sur un total des recettes prévues de 3 033 499 561 FCFA en 2021, la commune n’a pu encaisser que 990 739 643 FCFA, soit un taux de recouvrement de 32,66%.
Ceci, selon le nouveau maire, correspond à un manque à encaisser d’un montant de 2 042 759 918 FCFA. Et on voit dès lors toute la difficulté des services de recouvrements à atteindre les objectifs financiers définis dans le plan budget 2021.
Des Irrégularités importantes à clarifier
Evoquant le cas des malversations, le maire a souligné des irrégularités de la ligne du carburant. Un montant de plus de 70 000 000 FCFA a été utilisé comme carburant de fonctionnement en 10 mois alors que seulement trois voitures de l’administration ont été fonctionnelles durant cette période, soit près de 230 000 FCFA, l’équivalent de dépenses de carburant par jour pour seulement trois voitures fonctionnelles.
S’agissant du mobilier et matériel administratif, cette ligne budgétaire est de loin la plus problématique identifiée dans l’exécution « déclarée » du budget 2021. Pour rappel, il est déclaré dans l’exécution du budget 2021 qu’un montant de 19 974 450 FCFA a été utilisé pour une acquisition de mobilier de bureau. Or, lors de l’inventaire général que nous avons effectué sur l’ensemble du mobilier dont dispose la mairie, nous n’avons constaté aucun renouvellement de mobilier durant l’année 2021.
Le maire révèle que la dernière acquisition de mobilier date de 2014. Ce qui contraste totalement avec l’acquisition déclarée en 2021. D’où la question suivante : à quoi a servi le montant de 19 974 450 FCFA déclaré comme nouvelle acquisition de mobilier en 2021 ?
Par rapport à la propriété communale, ces entreprises font rentrer dans les caisses de la mairie seulement 13 millions 975 mille FCFA par an au moment où normalement ils doivent verser à la mairie la somme 426 millions 520 mille FCFA. Parmi celles-ci la CBAO.
La Mairie Thiès-Ville a loué à la CBAO un terrain urbain de 800 m2 à distraire du TF 6000 / TH sis à Randoulene Nord. Le bail est consenti pour une durée de 30 ans, signé le 01/Juillet/2003, moyennant un loyer de 6 000 FCFA le m2 par an (soit 500 FCFA le m2 par mois) ; ce qui représente un montant annuel global de 4 800 000 FCFA. Or, le décret n°2010-400 du 23 mars 2010 a fixé le prix du mètre carré sur cette voie à 40 000 FCFA par an (soit 3 300 FCFA le m2 par mois). Autrement dit, en application du décret n°2010-400 du 23 mars 2010, la CBAO devrait payer un montant annuel de 32 000 000 FCFA, soit un manque à gagner annuel de 27 200 000 FCFA.
La SONATEL est dans la même situation que la CBAO. Elle occupe un espace de 1 000 m2 donné en location par la Mairie à la date du 01/juillet 2003. Elle paie le mètre carré par an à 6 000 FCFA (soit 500 FCFA le m2 par mois) en dépit du décret n°2010-400 du 23 mars 2010 qui fixe le prix du mètre carré à 40 000 FCFA (soit 3 300 FCFA le m2 par mois) pour tout l’espace appartenant à la propriété communale. Autrement dit, en application du décret n°2010-400 du 23 mars 2010, la SONATEL devrait payer un montant annuel de 40 000 000 FCFA à la place des 6 000 000 FCFA annuels, soit un manque à gagner annuel de 34 000 000 FCFA par an.
Idem pour EMG : l’entreprise EMG exploite « illégalement » une superficie de 1435 m2 située sur la promenade des Thiessois. Or, à notre grande surprise, aucun contrat d’exploitation concernant le site en question ne lie la Mairie à ladite entreprise. Cette exploitation illégale constitue pour la Mairie un manque à gagner minimal de 8 610 000 FCFA par an, soit 68 880 000 FCFA pour les huit années durant lesquelles EMG a exploité le site. Par conséquent, la Mairie, dès le 24 mars 2022, a pris les dispositions nécessaires pour faire valoir ses droits, en sommant EMG de payer le montant global dû tout en l’invitant à se régulariser dans les meilleurs délais.
À cela s’ajoutent d’autres scandales financiers concernant la construction d’une partie d’un mûr de clôture estimée à plus de 19 millions FCFA entre autres. « Le seul compromis que je peux faire c’est qu’ils remboursent jusqu’au dernier centime », a promis le Dr Babacar Diop.