À l’heure de la demi-finale aller de Ligue des Champions entre Liverpool et Villarreal, nos confrères de L’Equipe se sont intéressés sur les débuts de Sadio Mané au FC Metz. Des techniciens, ex-coéquipiers et consultants interrogés par le média français ont témoigné sur le Sénégalais.
Parmi les favoris pour le Ballon d’Or 2022 figurent notamment Karim Benzema (34 ans), Kylian Mbappé (23 ans) et Sadio Mané (30 ans). Si les deux premiers semblaient promis à la gloire dès leur plus jeune âge, le troisième a vécu une éclosion tardive au très haut niveau, au fil d’une progression linéaire, passée par Salzbourg (2012-2014), Southampton (2014-2016) et Liverpool (depuis 2016). Mais c’est à Metz, il y a dix ans, que le Sénégalais a effectué ses débuts en pro, en Ligue 2. Et parmi ceux qui l’accompagnaient à l’époque, personne ne se figurait que cet attaquant alors chétif ferait un jour partie du cénacle des meilleurs footballeurs du monde, malgré ses évidentes qualités.
« Je me disais qu’il finirait comme un bon attaquant »
« Je me disais qu’il finirait comme un bon attaquant de L1, pas forcément mieux », avoue ainsi l’ancien relayeur Pierre Bouby, aujourd’hui consultant sur la chaîne L’Équipe. Un constat partagé par David Fleurival, milieu de terrain à Rodange (Luxembourg), qui a récemment été bluffé par le splendide but inscrit de volée par l’ailier de Liverpool, lors de la victoire contre Manchester City (3-2, le 16 avril en demi-finales de Cup : «Sur le coup, je me suis dit : “Ce n’est pas le même joueur que j’avais connu à Metz”(sourire).»
Cette différence entre le potentiel perçu de Mané à cette période et son niveau actuel s’explique d’abord par les difficultés que celui-ci a rencontrées lors de son arrivée en Moselle, début 2011. Tout juste majeur, il débarque de l’Académie Génération Foot à Dakar, l’incubateur de talents africains du FC Metz, qui n’était pas aussi bien structuré qu’aujourd’hui. « Sadio a dû réapprendre son jeu, analyse Olivier Perrin, l’actuel responsable de Génération Foot. Par exemple, il était habitué à jouer sur le sable et à être servi en profondeur sur des ballons piqués et il s’est retrouvé à évoluer sur des pelouses où on le lançait en une touche, dans l’intervalle.»
Un jeune sans complexe
Les premiers pas de Mané avec les – 19 ans messins se révèlent même hésitants, en raison d’une pubalgie tenace. Mais, une fois guéri, il grimpe les échelons à toute vitesse. « Sadio est passé en moins d’un an des – 19 ans aux pros, relève Joël Müller, qui œuvrait comme directeur technique dans le club lorrain. Les seuls que j’ai vu faire ça, c’est Robert (Pirès) et Kalidou (Koulibaly)… Sadio était obsédé par l’idée de s’améliorer. » Ce que confirme Désiré Segbe Azankpo, l’attaquant béninois du Dinamo Bucarest, qui vivait avec Sadio dans la chambre 16 du centre de formation messin. « Sadio et moi, on avait la pression de réussir, afin de nourrir notre famille. On se disait que plus on bossait, mieux c’était : dès qu’on le pouvait, on partait courir ou on allait à la salle de musculation. » Ces deux compères, qui sont restés très proches, s’autorisaient peu de loisirs. « Parfois on allait au centre commercial Saint-Jacques, d’autres fois on se promenait autour du point d’eau situé près du centre. Mais une fois là-bas, on se mettait à faire des exercices physiques et on finissait par se dire qu’il valait mieux les faire à la salle de muscu… »
« Il dribblait hyper facilement : on était obligés de lui mettre des coups pour l’arrêter »
Néanmoins, ce sont surtout ses coups d’éclat sur le terrain qui permettent à Mané de se rapprocher de l’équipe première. « J’ai découvert Sadio lors d’un match avec la réserve, remporté (4-0) à Sarre-Union (le 8 octobre 2011), se souvient Yohan Betsch, milieu au Foron (Régional 3). Alors qu’il avait un défenseur dans le dos, Sadio a piqué le ballon avec un effet rétro, il s’est retourné et il a filé vers le but. Sur cette action, il avait tout : vitesse, vista, talent. » Le milieu offensif Kévin Diaz (Istres, National 3) n’a lui pas oublié les premiers entraînements de Mané avec les pros : « Il dribblait hyper facilement : on était obligés de lui mettre des coups pour l’arrêter (il rit). »
“Sadio rêvait déjà de remporter un titre avec sa sélection alors qu’il n’avait pas encore été appelé avec les A » (DÉSIRÉ SEGBE AZANKPO, SON COÉQUIPIER AU CENTRE DE FORMATION DE METZ)
Le futur champion d’Afrique est lancé en L2, sous les ordres de Dominique Bijotat, le 14 janvier 2012, à Saint-Symphorien, lors d’une rencontre perdue par les Grenats face à Bastia (0-1). Quatre minutes après son entrée en jeu, à la 75e, Mané prend de vitesse la défense corse et provoque un penalty, tiré par Bouby : le ballon frappe la barre, franchit la ligne et ressort, mais l’arbitre refuse le but par erreur. Comme le symbole d’une saison qui va bientôt dérailler.
Au point qu’en mai, Metz est relégué pour la première fois de son histoire en troisième division, malgré la présence dans son effectif de quatre talents en devenir, tous âgés de 20 ans : Kalidou Koulibaly, Andy Delort, Bouna Sarr et donc Sadio Mané. En dix-neuf apparitions en L2 (pour 12 titularisations), ce dernier n’inscrit qu’un but et ne délivre qu’une passe décisive, avant d’être transféré fin août à Salzbourg (pour 4 M€).
Avec L’Equipe